L'huitre et sa coquille


Lundi 8 octobre 2012

Le réchauffement climatique consécutif aux émissions de gaz à effet de serre et notamment au CO2 est peu à peu considéré comme un risque majeur menaçant l’équilibre biologique de notre planète. Il est un autre aspect, moins connu, de l’action néfaste de ces émissions, c’est l’acidification des océans.

Un quart du CO2 de l’air diffuse dans la couche d’eau superficielle des océans. Avec l’eau il forme de l’acide carbonique qui se divise en ions bicarbonate CO3H-chargé négativement et en ions hydrogène (proton) H+ qui abaissent le pH de l’eau. Les ions bicarbonate à leur tour perdent un atome d’hydrogène pour devenir des ions carbonate qui s’associent avec le calcium ou le magnésium présents dans l’eau de mer et donnent du carbonate de calcium ou de magnésium qui seront utilisés par de nombreux organismes marin pour la formation de leur coquille. La baisse de la teneur en ions carbonate de l’eau de mer provoque une chute de l’état de saturation de différentes formes de carbonates comme la calcite et l’aragonite ; ces « calcaires » sont indispensables à la formation de la coquille de nombreux organites marins.

En été, dans l’Etat d’Orégon aux USA*, les vents soufflent du nord et poussent les eaux de surface de l’océan Pacifique vers le large ; les eaux profondes riches en CO2, du fait des transformations microbiennes qui s’y déroulent et des émissions anthropiques, viennent à la surface ; l’acidité de l’eau de mer s’accroit il s’ensuit une réduction des ions carbonates utilisés par les huitres pour fabriquer leur coquille. Les éleveurs de naissain d’huitres constataient d’importantes mortalités de larves (jusqu’à 80%) au cours de cette période et, très longtemps, ont cru a l’effet d’une bactérie parasite des  huitres, jusqu’à ce qu’ils fassent appel à un spécialiste de l’acidification des océans. Les mesures faites par le spécialiste ont montré que la pression de CO2 dans l’eau de mer et le pH de celle-ci fluctuaient saisonnièrement et que la mortalité des larves était forte quand le pH était au plus bas. Il a conseillé de remplir les réservoirs, dans lesquels étaient élevées les larves avec l’eau de mer lorsque son pH est le plus élevé et ainsi la mortalité à presque disparu.

Depuis l’époque préindustrielle le pH de l’eau de mer est passé de 8,2 à 8,1. D’autres organites marins qui fabriquent une coquille sont affectés par cette acidification ; ainsi la capacité à ajouter du calcaire à leur coquille des coccolithophores du phytoplancton a baissé de 30% depuis la période préindustrielle. Des observations semblables ont été faites chez les foraminifères et les diatomées. Le piégeage du CO2 sous forme de carbonates, leur absorption par les organismes marins à coquille et leur transformation définitive en dépôts au fond des mers sont affectés par l’excès de CO2 d’origine anthropique. Notre responsabilité, dans l’émission des gaz à effet de serre, va au-delà du réchauffement climatique.

*R.F.Service, Science, 6091, 13 Juillet 2012, pp.146-148



Les questions environnementales vous intéressent-elles ? Vous pouvez enrichir vos connaissances et acquérir une vision globale de ces problèmes en lisant mon dernier livre : « Environnement, l’Hypothèque Démographique ».



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire