Mercredi 5 Octobre 2016
La résistance des bactéries aux antibiotiques est devenue
préoccupante, l’utilisation de ces médicaments, quelquefois de manière
inappropriée, a conduit à la sélections de souches bactériennes résistantes.
Aussi des chercheurs* s’intéressent à d’autres moyens de traitements et l’un
des plus originaux est le recours aux bactériophages. Ces virus géants sont
tueurs de bactéries ; pour cela ils se fixent sur leur enveloppe et
injectent, à travers elle, leur ADN dans le cytoplasme ; l’ADN du phage s’y
multiplie, en déviant le métabolisme bactérien à son profit, et donne naissance
à de nouveaux phages qui provoquent la lyse de la cellule bactérienne. Ainsi
libérés ils pourront aller parasiter d’autres bactéries.
Les bactériophages ont été signalés de manière
anecdotique comme actifs dans le traitement d’infections réfractaires aux
traitements classiques et seraient déjà utilisés dans des traitements en Europe
de l’Est. Mais il n’y a jamais eu d’essai clinique rigoureux étendu à un nombre important de patients.
La Commission Européenne a lancé un appel d’offre
(PhagoBurn) pour qu’une expérimentation rigoureuse à grande échelle soit faite afin
de confirmer ou d’infirmer l’effet curatif de phages dans certaines infections
réfractaires. Le Ministère Français de la Défense en partenariat avec des
sociétés pharmaceutiques et des hôpitaux civils et militaires de France, Suisse
et Belgique se sont associés pour réaliser un essai de thérapie phagique sur
des brûlés ayant des blessures infectées. La mise en place de l’expérimentation
s’est heurtée à deux problèmes :
- Les phages ont
des cibles bactériennes spécifiques ce qui fait que les patients qui entreront
dans l’essai ne peuvent être infectés que par une seule bactérie or les brûlés
sont infectés le plus souvent par plusieurs bactéries.
- Les concentrations et les compositions des différentes
souches de phages utilisées doivent être stables dans le temps ce qui est
difficile à obtenir avec des mélanges de phages qui sont seulement semblables.
Une société française, Pherecydes Pharma, spécialisée
dans l’isolation de souches de phages à partir des eaux usées riches en
bactéries recueillies dans les effluents des hôpitaux parisiens avait commencé
un essai utilisant un cocktail de 12 ou 13 phages chacun, actifs contre Eschericia coli et Pseudomonas aeruginosa et avait enrôlé 220 patients à cet effet.
Cet essai pouvait fournir un départ pour Phagoburn à condition de rationaliser
l’essai afin qu’il soit conforme à une expérimentation irréprochable. Parmi les
220 patients enrôlés un seul avait Escherichia
coli et quinze étaient infectés par Pseudomonas
aeruginosa l’essai sera donc dirigé contre cette dernière bactérie et l’on
s’efforcera de trouver 110 personnes contaminées par elle. Phagoburn espère
recruter ces 110 patients d’ici la fin de l’année et avoir une réponse sur
l’efficacité du traitement en février ou mars prochains.
*Kelly Servick, Science,
24 juin 2016, N°6293, p.1506.
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