Y-a-t-il une diminution des populations d'insectes?


Vendredi 5 Juin 2020


Les insectes constituent un très grand groupe d’espèces qui tient une place majeure dans le fonctionnement des écosystèmes. Ils consomment des végétaux, ils dégradent des déchets, ils transforment tout cela en protéines, qui nourriront leurs prédateurs : oiseaux, animaux ; ils sont des agents de pollinisation indispensables à la multiplication des espèces végétales à reproduction sexuée. 
Pour l’être humain ils favorisent la production agricole par la pollinisation,  ils produisent des aliments comme le miel et d’autres produits utiles, mais ils sont aussi des parasites actifs qui affectent les récoltes et transmettent des maladies. De nombreuses alertes concernant la diminution des populations d’insectes ont été émises, ont-elles des bases scientifiques solides ? Notamment sont-elles conformes dans la durée et dans l’espace ? Des chercheurs* ont essayé d’y voir plus clair en analysant une masse de données qui ont été recueillies sur ce sujet, nous allons voir que leurs conclusions ne sont pas aussi catégoriques que ce que l’on annonce le plus souvent.

L’étude s’est appuyée sur des observations standardisées et à long terme (supérieures à 10 ans). La série de données incluait 166 compilations faites sur 1676 sites répartis dans 41 pays.

Ces études présentent une grande variation des tendances même entre des sites géographiquement voisins. Il apparait aussi, de manière évidente, qu’il y a bien un déclin de la présence des insectes terrestres estimé à 0,92% par an (-8,8% par décade) alors qu’au contraire, il y a une augmentation de la présence des insectes d’eau douce de 1,08% par an (+11,33% par décade). Comme l’eau douce n’occupe que 2,4 % de la surface terrestre, les deux résultats ne peuvent être combinés pour représenter les tendances à l’échelle mondiale.

Le déclin des insectes terrestres est particulièrement net en Amérique du nord et en Europe (il est vrai que les études y ont été plus fréquentes). Les tendances sont nettement affirmées en climat tempéré, méditerranéen, et pour les zones désertiques sèches. L’accroissement de la présence des insectes d’eau douce semblent récente car elle n’apparait que dans les dernières études.

Ces tendances à la baisse sont-elles liées aux activités humaines qui modifient non seulement la destination des sols mais aussi le climat ?
Les baisses sont plus faibles dans les zones protégées ; l’urbanisation n’agit que modérément sur la diminution de la présence des insectes terrestres, au contraire l’augmentation de la présence des insectes qu’ils soient terrestres ou d’eau douce est positivement associée aux espaces cultivés. Ceci serait lié à la stabilité des zones cultivées mais aussi au fait que les pratiques culturales seraient moins agressives de nos jours. Enfin il n’y a pas d’influence du réchauffement climatique ni de la pluviométrie sur l’augmentation ou la diminution de la présence des insectes.

Les conclusions de l’étude sont soumises à quelques réserves. Il y a sur- représentation des données provenant d’Amérique du Nord et d’Europe ;  les observations, très nombreuses, recueillies sur les zones protégées influent  fortement sur les tendances alors que leur part ne représente qu’un faible pourcentage des surfaces de la planète. De nouvelles données devraient donc être acquises sur les zones sous représentées.
Le déclin de la présence des insectes doit être associé au déclin des oiseaux insectivores ; en même temps leur accroissement dans les zones d’eau douce pourrait s’expliquer par une amélioration de la qualité des eaux.

*R Van Klink et al. Science, 24 avril 2020, N°6489, pp.417-420.    




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